L’Architecture d’Entreprise est-elle toujours pertinente face à l’Agilité ? Volet 3 : la boite à outils de l’architecte d’entreprise

par | 11 Sep 1919 | AE, Article

Préambule

Notre sujet est traité en 3 volets. Cet article en est le dernier.

Il n’existe pas de recette miracle universelle que les architectes d’entreprise peuvent préconiser à toutes les organisations pour réussir la transformation de leur Système d’Information (SI). S’il en était ainsi, notre métier aurait disparu.

Nous améliorons sans cesse notre boite à outils, en fonction de ce qui fonctionne (souvent à petits pas) et de ce qui échoue, ceci à l’occasion de nos missions. A défaut de solution miracle, ces outils peuvent être d’une grande aide à tout architecte d’entreprise.

Nous allons considérer 3 groupes d’outils :

  • Les outils mutualisés ;
  • Les artefacts en prérequis ;
  • Les outils spécifiques.

Cette présentation ne recense pas tout ce que l’Architecture d’Entreprise (AE) peut utiliser ou produire. Elle se concentre sur ce qui est indispensable à la pratique de notre discipline. Il s’agit d’un kit de survie conçu pour apporter des gains rapides à budget contraint.

Les outils mutualisés

Un certain nombre de référentiels et d’outils sont indispensables, sans qu’ils soient spécifiques à l’AE. Si ces éléments ne sont pas disponibles, alors les architectes d’entreprise ont intérêt à initier leur construction.

Le glossaire

Le glossaire est la pierre angulaire de la coopération puisqu’il rend possible un vocabulaire commun entre des acteurs très variés.

Le fait est que les architectes d’entreprise sont des agents fédérateurs au milieu de populations de spécialistes, le glossaire est donc leur livre de chevet. Les représentations partagées entre les métiers et les informaticiens prennent leur sens uniquement si la sémantique est unifiée.

Les premiers termes pour lesquels il est nécessaire de poser et diffuser une définition précise et partagée sont « processus », « objet métier », « donnée », « besoin », « exigence », « règle métier », « fonctionnalité », « produit », « solution », « indicateur », « composant applicatif » et « composant technique ».

Les fiches de rôles

Il est très intéressant de distinguer rôles et postes. Les rôles sont stables dans le temps quand les postes sont réagencés au gré des restructurations conjoncturelles.

Pour comprendre le canevas des champs d’action, le plus efficace est de construire des fiches de rôle synthétiques, mettant l’accent sur le portage d’enjeux. Bien entendu, une personne peut tenir plusieurs rôles. Pour autant, une activité ou une participation à une réunion se fait au titre d’un seul rôle, sans quoi le flou s’installe.

De nombreuses personnes souffrent de l’imprécision de leur périmètre et de ce que l’on attend d’elles. Les fiches de rôle clarifient et exposent à la communauté les missions de chacun et les articulations avec les autres.

Le modèle compact de fiche de rôle est composé de 4 encarts :

  • Les enjeux portés en nommant les objets métier dont le rôle est détenteur ;
  • Les activités selon le triptyque stratégie, tactique et opérations et en indiquant les artefacts à produire ;
  • Le positionnement hiérarchique ou matriciel, pour clarifier les interactions ;
  • Et les compétences requises (savoir, savoir-être et savoir-faire) pour faciliter l’attribution du rôle.

L’ensemble du contenu tient sur une diapositive. Chaque mot est pesé pour aller à l’essentiel et offrir le degré de liberté nécessaire dans une organisation agile.

Le forum de discussion

Faire converger la matière d’architecture en un contenu cohérent et clair est un préalable à son exposition aux autres populations. Un forum de discussion dédié à la communauté des architectes rend possible cela.

La mauvaise habitude est d’utiliser la messagerie (instantanée ou non) ou de s’appuyer sur les comptes-rendus épars des réunions de travail. Ces outils ne permettent pas d’avoir une vision agrégée, exhaustive, structurée et actualisée des sujets en cours. Ils génèrent juste une accumulation de deltas. La conséquence est que les participants d’un atelier réinventent la roue infiniment.

Un forum en revanche est un vecteur de capitalisation et de coopération. Il est facile à mettre en place, souple et ergonomique. Il s’organise en fils de discussion. Les architectes peuvent intervenir de manière asynchrone pour enrichir le débat. L’initiateur d’une discussion s’occupe de synthétiser le flux des réactions dans le corps du message originel au fur et à mesure que le consensus s’établit.

L’efficacité d’un forum repose sur plusieurs éléments :

  • Un code de bonne conduite et des modérateurs ;
  • Des animateurs, pour alimenter en contenu et susciter l’enthousiasme ;
  • L’incitation à ne plus utiliser la messagerie ou des dossiers partagés pour héberger le travail en friche.

Le WIKI

Grâce au forum, l’expression de notre vision de l’architecture est harmonieuse. Nous pouvons alors l’exposer aux autres parties prenantes de la transformation du SI.

Les soucis avec les entrepôts de documents (de la GED aux simples dossiers partagés) sont qu’ils nécessitent de l’effort pour versionner les pièces et de l’effort pour les consulter. En outre, le changement de la charte graphique représente un coût de remise à niveau prohibitif.

Au contraire, le Wiki est spécifiquement conçu pour mettre à disposition un patrimoine informationnel le plus simplement possible. Il assure une continuité de lecture sans couture. De la même manière, il facilite la maintenance du contenu, sans avoir à jongler entre des documents hétérogènes.

La cartographie métier

Puisque la valeur s’exprime d’après les enjeux métier, la cartographie des processus métier est le guide évident pour architecturer le système d’information.

Cette modélisation est coûteuse et elle est rarement tenue par les référents métier, qui en sont pourtant les arbitres. Nous verrons dans les outils spécifiques qu’il existe un raccourci pour faire de l’AE sans elle.

Les artefacts en prérequis

Deux artefacts de la vision applicative sont nécessaires à l’AE. Ces ingrédients permettent de construire la feuille de route de transformation du SI.

Le premier est la carte des briques applicatives existantes. Cette représentation est requise pour tisser les liens entre les fonctionnalités et ce qui les implémente.

Le second est la carte des flux de données inter-applicatifs existants, indispensable pour séquencer les chantiers de commissionnement et décommissionnement.

Les outils spécifiques

L’outillage est l’occasion de donner corps à la production de l’Architecture d’Entreprise.

Le méta-modèle d’entreprise

Le premier artefact emblématique de l’AE est le méta-modèle systémique, qui articule les concepts principaux depuis la vue stratégique jusqu’à la vue technique.

Il complète le glossaire en éclairant de manière très visuelle la cohérence globale.

Il permet de configurer la grammaire d’une solution de cartographie d’entreprise (ARIS, Hopex, Erwin, Signavio…). Avec une cinquantaine de concepts, nous disposons d’un modèle suffisant pour travailler.

Figure 1 : Proposition de méta-modèle d’entreprise

Le référentiel des objets métier

Voici notre cheval de bataille. Dans l’article sur la boussole du projet de transformation, nous expliquons le rôle essentiel des objets métier et de leur cycle de vie.

Si pour des raisons de coûts ou de délai, la cartographie des processus métier n’est pas disponible, alors nous pouvons nous focaliser sur les objets métier et leur cycle de vie comme guide de la valeur.

Figure 2 : Exemple de carte des objets métier issue d’un cas réel

La vision urbanistique (découpages fonctionnel et applicatif) est élaborée selon la contribution à l’avancée d’objets métier dans leur cycle de vie.

D’autre part, la gouvernance des données est organisée en fonction de la propriété des objets métier.

Le POS Fonctionnel cible

Le premier résultat concret de l’étude systémique du SI est le Plan d’Occupation du Sol fonctionnel à l’échelle de l’entreprise.

Le POS est une vision d’urbanisme composée de blocs (zones, quartiers et îlots) couvrant tous les domaines métier de l’entreprise.

Figure 3 : Exemple d’organisation urbanistique en blocs
Figure 4 : Exemple de zones du POS fonctionnel

Les urbanistes font usuellement référence à deux POS : celui de l’existant et celui en cible.

Nous suggérons, pour économiser l’effort, de construire un POS unique cible avec un code couleur spécifique pour les blocs existants et un code couleur distinct pour ceux à créer ou à transformer à chaque palier de la feuille de route.

La carte des briques applicatives évoquée précédemment est le POS applicatif, dont la physionomie doit être la plus proche possible du POS fonctionnel, aux contraintes applicatives prêt.

Vous noterez ici la grande proximité entre les rôles d’architecte d’entreprise et d’urbaniste.

Le plan de transition vers la cible

Quand la cible de la transformation du SI est définie, le plus délicat est de planifier les étapes pour aller de la situation existante à la cible. Des contraintes fortes pèsent sur la trajectoire : assurer la continuité de service et dépasser les résistances au changement.

Deux outils, déjà évoqués, permettent de construire le plan de transition :

  • Le POS fonctionnel avec les blocs colorés en fonction de la proximité à la cible ;
  • Et la carte des flux de données inter-applicatifs existants.

Conclusion

Le triptyque sur la pertinence de l’Architecture d’Entreprise s’achève. Après avoir fait un constat sévère, nous avons reformulé les enjeux, puis nous avons ouvert notre boite à outils.

Nous sommes convaincus que l’AE est un incontournable pour réussir la transformation du SI.

Elle doit cependant s’adapter aux nouvelles méthodes agiles de l’usine logicielle et doit séduire davantage ceux à qui elle offre ses services : les directions et les équipes opérationnelles.

En parallèle, nous sensibilisons les coachs agile à l’architecture d’entreprise. Avec notre appui, les cérémonies agiles produisent plus vite et mieux une vision métier cohérente. Alors les coachs, les scrum masters et les product owners deviennent nos alliés et nous impliquent dans les design sprints et les rétrospectives.

Les architectes d’entreprise œuvrent au quotidien pour gagner des sponsors en démontrant que la production de l’AE est un vecteur fantastique de coopération et de cohérence.

2 Commentaires

  1. Eric

    Merci pour cette synthèse pragmatique, mais … que fait ce bus dans le chapitre des artefacts 😉

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    • Frédéric Beer

      Merci Eric, et bien le bus s’occupe de transporter les flux de données ! ;-D

      Réponse

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